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  le blog de Bernard Giusti

Articles littéraires (romans, nouvelles, poésies, essais, sciences humaines) ) politiques et syndicaux

Le traitement des suicides à l’AP-HP

Publié le 3 Avril 2023 par Bernard Giusti in Articles politiques et syndicaux

Le traitement des suicides à l’AP-HP

[ Article rédigé pour le blog de la CGT Cochin en collaboration avec Aglawen Vega, Secrétaire Générale de la CGT Cochin]

Lorsqu’un agent se suicide, d’une manière générale les directions locales nient tout lien avec le travail et  bottent en touche afin de ne pas engager la responsabilité de l’AP-HP, et surtout la leur. Leur argument est toujours le même : « un suicide est toujours la conséquence d’une fragilité psychologique individuelle ». Il est vrai que pour travailler dans certains  services il faut avoir un moral d’acier pour résister à la pression d’une hiérarchie où semblent pulluler les petits dictateurs de couloir.

Au-delà de l’argument avançant que « le suicide est un acte individuel et personnel », peut-être faudrait-il rappeler aux différents acteurs hiérarchiques que depuis Émile Durkheim dans son fameux ouvrage « Le suicide » (1897)(1), il a été mis en évidence que le suicide peut être notamment aussi la conséquence d’un environnement professionnel délétère. C’est bien le sens d’un rapport de l’INRS (Institut National de la Recherche Scientifique) : « De nombreuses études épidémiologiques ont établi un lien entre des contraintes de travail génératrices de stress chronique et l’apparition d’une dépression. Celle-ci peut, ensuite, favoriser un passage à l’acte suicidaire. Parmi les contraintes de travail étudiées, on retrouve notamment le déséquilibre entre une forte exigence psychologique et l’absence de marges de manœuvre […] (2)»

La politique des gouvernements qui s’acharnent depuis des décennies à détruire (c’est-à-dire privatiser) l’hôpital public mène dans nos hôpitaux à des situations de maltraitance des agents, qui de fait les poussent à la démission ou à la dépression. Ils sont alors souvent remplacés par de l’intérim ou des CDD, plus malléables et surtout plus faciles à virer. Le zèle agressif des serviteurs de cette politique de destruction s’ajoute au manque de personnel, au manque de moyens, à des rythmes et des contraintes de travail insupportables (« forte exigence [pression] psychologique et absence de marges de manœuvre »).

Pour la CGT Cochin il est donc indéniable que la plupart du temps le suicide d’un(e) collègue est fortement lié aux conditions de travail de son service.

Plutôt que de se dédouaner à chaque fois, il serait plus que souhaitable que les directions de nos hôpitaux prennent en compte qu’un suicide « est aussi un signal d’alerte pour l’entreprise. L’extrême souffrance de la personne qui passe à l’acte peut témoigner (au-delà de l’impasse existentielle dans laquelle elle se trouvait) d’une situation de malaise plus largement répandue dans l’entreprise. La prévention des suicides au travail passe donc d’abord par une démarche globale de prévention des risques psychosociaux et, en cas de passage à l’acte, par une analyse de l’acte suicidaire. (2)» » A condition évidemment que cette démarche et cette analyse se fassent sérieusement et indépendamment de toute servilité envers les directions locales.

Étant donné la politique de nos gouvernements successifs, serviteurs zélés du capitalisme et déterminés à démembrer et privatiser les hôpitaux publics, il est peu probable que les conditions de travail s’améliorent. Elles vont continuer à se dégrader. L’exploitation dans nos hôpitaux et pour tous les travailleurs ne peut que se renforcer pour le plus grand profit de quelques-uns. Sauf à leur opposer une résistance massive et déterminée

Il est urgent de changer de système.

Ne restez pas isolés : rejoignez la CGT!

 

(1) « Le suicide » a fondé la discipline de la Sociologie

(2) https://www.inrs.fr/risques/suicide-travail/ce-qu-il-faut-retenir.html

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